Solenville Strasbourg

Les sols urbains comme vitrine de la biodiversité ordinaire

Sauf mention contraire, cette photographie ainsi que toutes les photographies suivantes sont créditées ©Franck-Neumann, 2021

Le contexte
Conserver des sols vivants est important car ils assurent :
– L’assise de la vie végétale (air sain, alimentation, matériaux, paysage…),
– L’infiltration et épuration de l’eau,
– La régulation de la qualité de l’air et du climat (local et global),
– Le cycle de la matière organique et le stockage du carbone,
– Le socle de la chaine alimentaire et un habitat pour la biodiversité (y compris pour de nombreuses espèces de la faune dite « auxiliaire »).
Ce sont des services écosystémiques majeurs pour la vie sur terre.
Voir et comprendre les sols comme un volume vivant plutôt que comme une surface inerte permet de mieux appréhender l’ensemble des enjeux qui s’y concentrent et constitue un gage de résilience. Or, à ce jour, la biodiversité des sols reste mal connue, particulièrement en milieu urbain où ils sont recouverts par les constructions et les voies de communication.

Nos objectifs
SOLenVillE est un programme de sciences participatives qui vise à améliorer la connaissance de la biodiversité des sols urbains de la région strasbourgeoise au travers de l’étude de la macrofaune de ces sols. Ce programme a pour objectif de promouvoir les bonnes pratiques en matière de conservation et de régénération de cette biodiversité et à jeter des ponts entre le grand public et le monde de la recherche scientifique. Il concourt également à la création de référentiels et indicateurs robustes sur la vie des sols à travers sa contribution à l’observatoire participatif de la vie des sols*.

Photographie ©Glatron, 2021

Au-delà des aspects scientifiques, SOLenVillE a l’ambition de faire des enjeux liés à la connaissance et la préservation des sols une question de société et de contribuer à préfigurer ce que pourrait être une future « trame brune ».
*Apolline AUCLERC, Laboratoire Sols & Environnement, Université de Lorraine.

Nos moyens
Dans une logique de réseau, la démarche SOLenVillE s’applique à articuler les actions d’un maximum d’acteurs. Cette synergie, la plus large possible, est mise au service de la connaissance et de la préservation du fonctionnement des sols urbains.
SOLenVillE associe des chercheurs des universités de Nancy et de Strasbourg (en particulier au sein de la Zone Atelier Environnementale Urbaine (ZAEU), des agents des services de l’Eurométropole de Strasbourg et toutes les bonnes volontés (habitants, étudiants, scolaires, naturalistes, jardiniers, adaptes du compostage, à titre individuel ou au sein d’associations…).

Tous ont en commun de s’impliquer pour développer la connaissance de la biodiversité des sols urbains en recourantà un protocole de collecte et d’analyse adapté à un usage « grand public » baptisé Jardibiodiv.

Le projet, retenu dans la cadre de l’appel à projet Idex « Sciences participatives » de l’Université de Strasbourg, bénéficie d’un financement qui lui a permis, entre autres, de créer un poste d’animateur / coordinateur du programme, d’acquérir outils et documentation nécessaires à la reconnaissance des organismes collectés, de diffuser nos informations.
La démarche propose des outils, des temps de formation, des ateliers, des conférences, des rencontres et échanges avec des personnes ressources  à destination de tous les publics afin d’accompagner les volontaires qui souhaitent contribuer à développer cette connaissance et plus généralement s’approprier cette question de la place et des fonctions des sols en ville.

Ainsi chacun peut lancer des investigations dans son coin de jardin, de potager ou à côté de son compost, tout en faisant progresser les connaissances scientifiques sur la biodiversité des sols depuis le printemps 2021. La logique participative et les outils mis en place privilégient par ailleurs une circulation optimale de l’information (tant montante que « descendante ») caractérisée en particulier par l’organisation d’un événement de « bilan annuel » animé par les chercheurs proposé aux participants chaque fin d’année.

Programme de sciences participatives sur la biodiversité des sols urbains

Le sens de notre action
SOLenVillE vise à mieux connaître la qualité biologique des sols en formant et accompagnant des citoyens dans la mise en œuvre de relevés et d’identification de la macrofaune des sols suivant une démarche scientifique participative.
Le programme cherche à coordonner et étendre l’utilisation de l’outil « Jardibiodiv » sur lequel il s’appuie, pour contribuer à une collecte de données robustes sur la richesse faunistique des sols. Ce faisant, il vise à populariser ce segment de la biodiversité, souvent ignoré et pourtant essentiel à la vie sur terre et à sensibiliser sur son importance ainsi que sur les actions à mener pour en améliorer la richesse (ou en limiter la détérioration).

Vidéo de présentation : 


La ville, parce qu’il s’agit d’un milieu très minéralisé, est le terrain privilégié pour notre action.
– Elle concentre les populations humaines donc permettra d’atteindre de nombreuses personnes,
– En matière de biodiversité, elle peut être considérée comme un espace de conservation (au regard d’espaces agricoles qui tendent à détruire les habitats),
– Bien que peu visibles et peu considérés, les sols urbains offrent une opportunité très accessible de reconnexion avec la nature d’ailleurs valorisée par les collectivités locales et divers acteurs gestionnaires des espaces urbains (l’université de Strasbourg étant l’un d’eux).

Cette photographie ainsi que toutes les photographies suivantes sont créditées ©Franck-Neumann, 2021

Comment s’engager concrètement dans SOLenVillE ?
Rien de plus facile… Pour cela vous pouvez collecter et identifier la petite faune du sol de votre jardin (ou d’ailleurs) grâce à l’application « Jardibiodiv » (voir plus bas).
Des temps d’ateliers / formations collectifs pour découvrir et s’approprier cet outil sont organisés régulièrement tout au long de l’année dans le cadre de SOLenVillE pour aider tous les volontaires à se lancer. L’analyse et l’interprétation des résultats peuvent également être effectuées en groupe, en présence de chercheurs et personnes ressources.
Contactez-nous pour en savoir plus et vous inscrire.

Les conférences « Déconfinons les sols »
Nous proposons également tout au long de l’année de multiples événements autour de la thématique des sols et de la vie des sols. Le plus emblématique étant le cycle de conférences « Déconfinons les sols » qui propose chaque mois de découvrir cet univers sous des angles multiples et variés grâce à l’appui et au partenariat de nombreux chercheurs et enseignants issus de l’Université de Strasbourg (et de nombreuses autres). La grille de lecture des socio-éco-systèmes propre à la ZAEU permet d’appréhender cette question sous l’angle complémentaire des sciences humaines et des sciences expérimentales, entre vulgarisation scientifique et approche pragmatique et technique dans un cadre de développement durable. Ces conférences sont gratuites et ouvertes à tous.
Contactez-nous pour en savoir plus et vous inscrire.

Témoignage des participants :

Nous contacter
Pour participer au programme de sciences participatives sur la biodiversité des sols urbains SOLenVillE Strasbourg et/ou être tenu informé des nombreux événements, conférences et formations programmés, faites-vous connaitre auprès de contact.solenville@gmail.com ou suivez-nous sur www.facebook.com/solenville.
Nous diffusons également une newsletter mensuelle avec tous ces éléments. N’hésitez pas à nous demander de vous y inscrire.
Pour plus d’informations sur le programme des événements, vous pouvez aussi visiter notre page manifestations scientifiques.
Vous pouvez enfin suivre le chemin parcouru depuis le début de la démarche et retrouver nombre d’informations et ressources par le biais de la plate-forme collaborative Oscahr (Osons les sciences dans la culture, les arts et l’histoire), mise en ligne par le Jardin des sciences de l’Université de Strasbourg.

Jardibiodiv, l’outil participatif support du programme…
Tout est parti d’une simple question : Nos sols urbains, sont-ils vivants eux aussi ?
L’artificialisation des milieux, liée à l’urbanisation des sols, induit des défis environnementaux auxquels les aires urbaines tentent de répondre. Par exemple, les villes accordent une importance croissante à la création d’espaces verts : parcs publics, jardins privatifs et partagés, arbres d’alignement ou toitures végétalisées. Des espaces de vie qui constituent, pour bon nombre d’organismes, des habitats idéaux.
Compte tenu de la variété d’usages des terrains en milieu urbain, les sols subissent des modifications plus ou moins profondes : imperméabilisation, tassement après le passage de machines, pollution… Les conséquences de ces multiples pressions sur la survie des organismes qui y vivent demeurent peu connues.

Un outil de partage sur la vie des sols urbains
C’est dans ce contexte que l’outil numérique et participatif Jardibiodiv a été créé à l’été 2017 grâce aux recherches conduites sur l’écologie et la biologie des invertébrés des sols par Apolline Auclerc au sein du Laboratoire sols et environnement (ENSAIA de Nancy).
Les sciences participatives, qui établissent des collaborations durables entre la communauté scientifique et la société civile, offrent une approche particulièrement pertinente en milieu urbain.
Outil ludique, Jardibiodiv permet à tout citadin de découvrir les organismes présents dans les sols urbains et leurs rôles. En introduisant un récipient (Ecocup, pot de confiture vide…)  – « pot piège » – dans le sol de son jardin et en y ajoutant du vinaigre blanc, on peut capturer les organismes présents dans le sol (actifs principalement au printemps et en automne). Pour étalonner la récolte et permettre ainsi des comparaisons de richesse et de biodiversité d’un espace à l’autre, une même durée de piégeage doit être respectée : conventionnellement, elle est de 7 jours.


L’utilisateur de Jardibiodiv compte et associe un nom à chaque organisme récolté, grâce à une aide en ligne simple, sous forme d’images et de clés de détermination. Il les partage ensuite via le site Internet, ce qui aide les chercheurs dans leurs travaux. Depuis l’été 2020, ce portail existe aussi sous la forme d’une application pour smartphone.

Une adaptation plus « éthique » de la méthode, sans utilisation du vinaigre qui tue les bêtes capturées, a été mise au point : par dépôt d’un coton humidifié au fond du verre, elle permet de conserver les organismes vivants tout en récoltant de la même manière des données utilisables par les scientifiques.

La construction d’une base de données

Les connaissances produites dans le cadre de ces recherches citoyennes permettent notamment de créer des bases de données, encore trop rares aujourd’hui : il s’agit par exemple d’établir des seuils d’abondance (pour répondre à la question « Ai-je beaucoup ou peu d’invertébrés dans mon sol, par rapport à la moyenne, pour lui permettre un fonctionnement durable ? »), ou encore des atlas de biodiversité communale.

La constitution de tels référentiels pourra permettre, par exemple, d’intégrer la trame « brune » (réseau formé de continuités écologiques entre les sols) dans les stratégies du développement urbain, en prenant en compte des corridors pédologiques, c’est-à-dire les liaisons entre des habitats importants pour les organismes du sol.

Coordinateurs du projet SOLenVillE

Sandrine GLATRON
Directrice de recherche au CNRS, Zone atelier environnementale urbaine (ZAEU)

Florian FRANCK-NEUMANN
Animateur et coordinateur du programme SOLenVillE
contact.solenville@gmail.com

Parutions récentes

  • Aliss Science société (2017) Prendre la société de la connaissance au sérieux, Livre blanc. 78 p. Disponible en accès libre ici
  • Auclerc, A. (2021) Découvrir les invertébrés vivants à la surface du sol, Quae Edition, coll. « Les mémos de Quae », 51 p.
  • Auclerc A., Blanchart A., Vincent Q. (2019) « Jardibiodiv, un outil de sciences participatives sur la biodiversité des sols urbains ». Etude et gestion des sols, 26, pp. 195-210.
  • Charvolin F. (2013) « Pense-bêtes, astuces et recettes de jardiniers-observateurs de papillons. Retour sur une science citoyenne ». Revue d’anthropologie des connaissances 2013/2 (Vol. 7, n° 2), p.485-500
  • Guiheneuf P-Y. (2012) La propriété des données dans les programmes de science participative : état des lieux des pratiques de droit. Dial Ter, 10 p. Disponible en accès libre ici
  • Houllier F. (2016) Les sciences participatives en France. Etat des lieux, bonnes pratiques et recommandations. Rapport de la Mission Sciences participatives. 122p.
  • Levin, M.J., Kim, K.H., Morel, J.L., Burghardt, W., Charzynski, P., Shaw, R.K. (2017) Soils within Cities. Global approaches to their sustainable management: composition, properties, and functions of soils of the urban environment. Schweizerbart, Stuttgart, Germany.
  • Meulemans, G. (2020a) « Urban Pedogeneses: The Making of City Soils from Hard Surfacing to the Urban Soil Sciences ». Environmental Humanities 12 (1).
  • Meulemans, G. (2020b) « Reclaiming freak soils: From conquering to journeying with urban soils ». In Salazar, J.F., Granjou, C., Krzywoszynska, A., Kearnes M. and Tironi M. (eds.),  Thinking with Soils: Material Politics and Social Theory, Bloomsbury, London, UK : 157-174.
  • Meulemans, G. & Granjou C. (dir.) (2020) « Les sols, nouvelle frontière pour les savoirs et les politiques de l’environnement ». Revue d’anthropologie des connaissances, 14-4, dossier thématique.